Chronique sur On a créé UN MONSTRE
Stéréo-Séquence, novembre 2013
Début novembre. Il tombe des
peaux de lièvres sur Québec alors qu’ici, à Montréal, on a les pieds dans la
flotte et les os rongés par l’humidité. Vous avez bien lu : Montréal.
Stéréo-Séquence étend ses tentacules hors les murs de la Vieille Capitale.
Je me rends rue Ontario rejoindre
les garçons pour notre premier tournage de la journée. Je ne suis pas tout à
fait réveillée. C’est qu’il est 9 h du matin, quand même. Et la nuit a été
courte : il y avait longtemps que j’avais vu ma bonne amie Marie-Soleil,
qui a eu la gentillesse de m’offrir le gîte tout le week-end.
En attendant, j’inspecte les
alentours de ce gros immeuble blanc dont le béton semble s’effriter par
endroits. Derrière, tout un réseau de voies ferrées s’enchevêtrent. J’apprends
plus tard que la bâtisse, qui abrite aujourd’hui une multitude de locaux
d’artistes, appartenait autrefois au CN. D’où les rails et les wagons en guise
de paysage.
Voilà enfin les garçons, café
fumant à la main, suivis par les membres du groupe On a créé UN MONSTRE. Dans leur boost
matinal à eux, quelques onces de Sortilège pour se mettre dedans. C’est ça, le
rock n’roll.
On se regroupe au quatrième
étage, dans le studio photo de l’agence Matonvu.ca. Le local est lumineux avec
ses immenses fenêtres à carreaux qui projettent une vue splendide sur l’est de la
métropole. Mon regard se pose sur les immeubles disposés en rangées bien
droites, les commerces de la Promenade Ontario et le Stade olympique qui se
profile au loin. C’est très industriel comme décor. Je regrette mon Diana
Mini : ça aurait fait de belles images.
Les garçons installent leur équipement,
les musiciens se positionnent avec leurs instruments. Pour se réchauffer un
peu, ils entament Sweet Child O’Mine
de Guns’N’Roses, N’importe quoi
d’Éric Lapointe, Take My Breath Away
de Berlin… C’est l’hilarité générale.
Mais bon, assez fanfaronné, on a
une capsule à tourner. Une première, puis une deuxième prise : les
musiciens sont plus ou moins satisfaits de leur performance. C’est qu’ils ont
peu dormi hier, apparemment. D’où le choix de la pièce La fatigue, peut-être? Mais si la nuit d’Antoine Lachance a été
aussi brève que la mienne, sa voix puissante et tissée d’émotion brute n’en
laisse rien paraître. Ghislain Lavallée (percussions) et François Larivière
(guitare acoustique) me semblent eux aussi en grande forme.
Après trois ou quatre prises, on
sent tout à coup que la prochaine sera la bonne. Les gars du band sont
confiants; la chimie entre eux, parfaite, est palpable. Je plonge dans leur
univers, me laisse bercer par la musique, les mots. Ce solo de guitare
électrique, carrément envoûtant, suivi de cette montée dramatique juste avant
la fin, où tout s’arrête…
Et cette mélodie! Elle accroche,
elle s’accroche, elle tourne en boucle longtemps encore après la dernière note.
Et c’est tellement plus agréable que d’avoir N’importe quoi dans la tête.