12 novembre 2013

Joseph Arthur à Stéréo-Séquence

Chronique sur Joseph Arthur
Stéréo-Séquence, le 29 août 2013 (mis en ligne en novembre 2013)
http://stereo-sequence.com/episodes/ep54/


Le temps. Celui qui passe, qui stagne, qui nous échappe, qui fuit. Celui que l’on voudrait étirer à l’infini au cours de ces nuits où la magie s’installe, les heures chargées de désir, d’envies, d’amour en devenir. Celui qui semble prendre un moment de répit lors des journées froides de janvier. Celui ponctué d’ennui où les minutes, insoutenables, nous paraissent durer des vies.

La perception du temps, c’est ce à quoi je réfléchis ce soir dans le studio des garçons. Jimmy est parti depuis plus d'une heure. Sa mission est de nous ramener Joseph Arthur, qui se produira pour Stéréo-Séquence juste avant son spectacle qu'il donnera au Cercle. Le test de son a été retardé, le souper aussi et... voilà, tout s'enchaîne.

Si au moins il ne faisait pas si froid... En cette fin d'août, on sent déjà l'automne s'immiscer entre les rayons d'un soleil moins ardent qui éteint le jour beaucoup trop vite à mon goût. Je tente de réchauffer mes petits pieds. Faut que je bouge. J’erre du studio à la ruelle, là où aura lieu le tournage, puis de la ruelle au studio. Un ballet incessant de va-et-vient. Parfois, je m’assois sur le grand divan de cuir noir campé dehors sur le bitume, en songeant que bientôt, très bientôt j'espère, il recevra les fesses de l'artiste.

La noirceur tombe rapidement et les garçons s'affairent à l’éclairage, disposant quelques projecteurs sur le «plateau». C'était pas prévu dans le plan initial : on devait tourner de jour. Je fais défiler les actus Facebook sur mon portable pour la énième fois quand Jimmy débarque enfin avec Joseph Arthur, accompagné de son gérant d’un batteur qui s’avère être Russel Simins, le même qui manie les baguettes avec brio dans The Jon Spencer Blues Explosion. OK. Ça éclipse l’attente, tout à coup.

Et c'est là que tout me semble filer à la vitesse de l'éclair. Les musiciens se vautrent sur le canapé. Joseph, un tantinet fier et soucieux de son image, se mire dans la caméra de son iPhone pour rectifier sa coiffure. Il s'empare de sa guitare et gratte quelques notes pour se réchauffer. Russel dépose le guitar case de Joseph sur ses cuisses pour faire les percussions. À défaut de batterie, on s'arrange avec les moyens du bord.

Tout le monde est paré pour le tournage. Joseph entame All the Old Heroes, une longue pièce tirée de son dernier album, The Ballad of Boogie Christ. Sept minutes de pur bonheur, où sa voix devient un véritable instrument, mise en avant dans cette magnifique adaptation acoustique. Sept minutes à ne pas sourciller, envoûtée, transportée dans l’univers imagé du peintre-auteur-compositeur-interprète. On reprend une deuxième fois pour la chance, et c'est celle-là qui sera choisie : Joseph demande à chacun d’entre nous laquelle des deux captations est la plus réussie. C’est ultra sympathique de sa part, lui qui est débarqué au studio un peu froidement, pressé par le temps.

Ce temps qui, tout au long de la prestation, m’a semblé filer beaucoup trop rapidement.



– Julie Bouchard