23 janvier 2014

O Linea à Stéréo-Séquence

Chronique sur O Linea
Stéréo-Séquence, le 9 novembre 2013 (mis en ligne le 8 janvier 2014)

Connaissez-vous L’Express Rock’N’Roll? Imaginez un autobus scolaire, celui du temps de votre primaire. Au lieu d’être jaune, il est complètement repeint en noir. À bâbord et à tribord, les mots ROCK’N’ROLL s’impriment en lettres géantes. Sur un côté, des portraits d’artistes y sont dessinés, dont Robert Charlebois dans ses folles années. À l’intérieur, à part le siège du chauffeur, tous les bancs ont été enlevés, remplacés par des dizaines d’artefacts : un juke-box regroupant des pièces de Marcel Martel, des Jérolas et d’André Lejeune; des pochettes de vinyles originales des Classels, de Michèle Richard et des Baronets; des affiches de spectacles, dont une des Beatles lors de leur venue au Forum en 1964. Mélomane finie, j’en ai des frissons d’excitation.

C’est dans ce Musée-Mobile voué à la préservation et la mise en valeur du rock québécois qu’a lieu le tournage aujourd’hui. C’est la première fois qu’un band se produit dans l’Express. Et quoi de mieux qu’O Linea pour casser la glace?

Cependant, l’espace est restreint, et on ne pourra pas tous être témoins de l’enregistrement. Même moi je devrai me contenter d’entendre les musiciens de l’extérieur. Mais comme je dois feeler le moment pour vous le décrire, j’assiste aux répétitions et tests de son, les fesses campées sur le tableau de bord de l’autobus. En guise d’éclairage, une série de minuscules lumières ornent le plafond, passant du vert au bleu au rouge. On se croirait dans un manège à Expo Québec… Le premier qui me vient en tête est le Gravitron. Vous savez, celui qu’on appelait le «vomitron»? Eurk.

Mais tout ce qui brasse ici, c’est ce qui sort des amplis, et y a vraiment pas de quoi avoir mal au cœur tellement c’est bon. Les gars du band sont à l’aise, agiles, maîtrisant tous parfaitement leurs instruments. À l’abri de toi, pièce tirée de leur album Distractions paru en 2012, s’inscrit rapidement en moi… Un ver d’oreille qui, je le sens, ne me lâchera pas de la journée.

Leur rock franco pesant attire les passants sur Sainte-Émilie coin Bourget à Montréal, tout près du Marché Atwater. Ils devront, eux aussi, se contenter d’en grappiller quelques notes sur le trottoir, imaginant quatre musiciens s’éclatant les tympans dans un autobus transformé en musée ambulant.

Je fais le pied de grue, transie par le froid humide de cet après-midi de novembre. J’ai hâte de voir ce que les garçons ont filmé. Ça me réchauffe un peu d’y penser.