25 février 2014

Gabrielle Shonk et Geoffroy Sauvé à Stéréo-Séquence

Chronique sur Gabrielle Shonk et Geoffroy Sauvé
Stéréo-Séquence, le 19 février 2014 (mis en ligne le 23 février 2014)

J’ai un aveu à faire : je ne suis absolument pas fan des shows télévisés à la The Voice. En fait, le contenu cathodique en général est pour moi synonyme d’ennui et de perte de temps. Ma vieille télé de deux tonnes et demie est rarement ouverte et ne sert qu’à enlaidir une partie de mon salon. Souvent, il me prend l’envie de la foutre dehors. Cet hiver, pourtant, je ressens une petite joie lorsque j’entends grésiller ses ondes dans la quiétude de mon appartement.

C’est la faute à Louis-Jean Cormier.

Je n’y peux rien, je l’admire. J’aime tout, tout ce qu’il fait. J’étais déjà conquise du temps de Karkwa, et son projet solo m’a littéralement achevée. L’artiste en moi s’émerveille et s’incline candidement devant son prolifique talent créatif.

Donc, c’est la faute à Louis-Jean si je me cloue dans le canapé chaque dimanche pour regarder La Voix à TVA. Et ce soir, les garçons et moi avons la chance de capturer à l’écran de Stéréo-Séquence deux belles bibittes qui font partie de son équipe. L’énigmatique Geoffroy Sauvé a fait la route Montréal-Québec pour retrouver celle qu’il a « adoptée » en coulisse, la charmante Gabrielle Shonk, le temps de nous offrir une prestation devant public.

On installe nos pénates dans le nouveau local de la Galerie d’art Factory. Tôle oxydée en toile de fond, imitation rouille sur une des cloisons : les œuvres qui tapissent les murs adoucissent l’effet industriel qui se dégage des lieux. Derrière le set-up monté pour le tournage, les tons de rouge dominent et embrasent le décor.

Pendant que Gabrielle et Geoffroy branchent leurs guitares, une cinquantaine de personnes investissent la galerie et s’amassent autour d’eux. On reconnaît dans la foule deux autres candidats de La Voix, Catherine Grenier et Rémi Chassé. L’air ici est saturé de talent.

Le duo débute avec Georgia on my Mind de Ray Charles. Difficile de ne pas succomber devant l’interprétation qu’en font Gab et Geoff. Dès les premiers accords, le charme opère et le public, silencieux et attentif, est subjugué. Leurs voix s’harmonisent; leurs sourires sont complices. Même envoûtement pendant Billie Jean de Michael Jackson, où les cordes vocales des deux artistes voltigent aisément dans les hautes tout autant que dans les basses notes. À faire rougir d’envie le Roi de la pop.

Y a pas à dire, Louis-Jean a du flair. Et nous, on est sacrément privilégié de faire un tout petit peu partie de leur grande aventure.

Naître ou ne pas naître : quand les gars se font tasser

Chronique sur le webzine culturel Mauvaise Herbe
Le 20 février 2013
http://www.mauvaiseherbe.ca/2014/02/20/naitre-ou-ne-pas-naitre-quand-les-gars-se-font-tasser/


Chronique 1 de 2 sur la maternité


Aaah les gars. Si vous saviez.

Vous pouvez même pas imaginer. Nos rêves de petites filles tricotés à même une blondasse aux seins plantureux usinée en série chez Mattel. Son mâle au sourire plastique qui la sortait de sa maison tout confort pour se pavaner au resto le samedi soir, la couvrant de fleurs et de bijoux de pacotille. « Je t’emmènerais en voyage / Voir les plus beaux pays du monde / Te ferais l’amour sur la plage / En savourant chaque seconde », chantait Diane Tell. On y croyait tellement.

Ado, on se rejouait le même scénario tous les soirs dans notre tête. Juste avant que le sommeil nous projette lui aussi une panoplie de songes kitsch sur fond d’écran rose fuchsia. Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants. Toutes nos attentes envers la vie reposant sur cette douce utopie.

Comme nous étions candides.

Au fil des années, nos rêves se sont matérialisés. Enfilade d’essais/erreurs. L’amour en montagnes russes. Le cœur qui cogne trop fort. La sueur des premiers émois. Les étoiles de manga dans nos yeux en pâmoison. Les perles de larmes et de sang dans les draps. Les désillusions, les trahisons, l’ennui. Les braises qui s’éteignent doucement et virent au gris.

Plus tard, nous avons laissé tomber nos fantasmes de petites filles romancées et sommes devenues des femmes pragmatiques et libres. Libres d’être, de choisir.

Obtenir les mêmes choses que les gars.

Et enfanter toute seule.

***

C’est l’histoire d’Isabelle*, 39 ans. Elle me parle de sa dernière rupture. Ses propos ne sont pas amers, mais plutôt empreints d’une fatale lucidité. De nouveau célibataire à l’aube de la quarantaine, elle réalise qu’elle n’a plus beaucoup de temps devant elle pour devenir maman. Mais elle a un plan de rechange.

Il y a aussi Karine*, 32 ans, mère d’un enfant IAD1. Elle en est à sa deuxième insémination afin d’offrir à sa fille un petit frère ou une petite sœur. Ayant vécu beaucoup trop de relations cahoteuses, cette belle brune déterminée s’était fixé un but : être déjà maman à 30 ans. Avec ou sans homme dans le collimateur.

Pour Isabelle, l’insémination artificielle est une affaire de temps et de circonstances; pour Karine, c’est un choix fait en toute conscience. Si le cas de Karine vous semble particulièrement weird, sachez qu’elle est loin d’être la seule : c’est dans l’air du temps, comme ils disent.

D’ailleurs, au moment où j’en discute avec elles, je lis Les tranchées de Fanny Britt, un recueil de fragments magnifique où de jeunes femmes se questionnent entre autres sur la maternité, celle vécue au sein du couple standard ou celle que l’on décide d’expérimenter… en solo.

Isabelle et Karine n’ont pas cessé de croire à l’amour, ni à la vie de couple. Mais elles veulent des enfants. C’est fondamental pour elles et ça fait partie d’une importante quête de sens. Et comme bien des femmes engluées dans cette ère de surconsommation relationnelle, elles en ont assez d’attendre « le bon ». Maintenant que la procréation médicalement assistée est offerte gratuitement, elles ont les moyens d’y arriver autrement. Elles appartiennent à une nouvelle génération de familles; elles sont monoparentales par choix.

Ça y est. En 2014, on en est là. On peut désormais se permettre de se passer des hommes sur tous les fronts. Comment vous sentez-vous, les gars? Avez-vous l’impression de vous faire chosifier? À quoi servez-vous maintenant, si vos performances au lit ne sont plus indispensables pour créer la vie?

Juste pour vous rassurer, et vous démontrer que les femmes qui veulent enfanter seules ont tout de même « besoin » de vous, je vais citer un extrait des Tranchées : « Mon envie d’avoir un enfant ne me fait pas chercher un homme à tout prix pour combler cette envie-là, puisque je sais que je peux en avoir un toute seule. Je cherche un homme pour être en amour. Point. »

Isabelle et Karine sont du même avis. Elles sont persuadées qu’en étant comblées par la marmaille, elles auront moins d’attentes et d’exigences envers un éventuel partenaire. Finie, la pression. Les gars sont un « bonus », un « petit plus ».

Des Ken de chair et d’os qui, elle l’espèrent, déposeront à nouveau des étoiles de manga dans leurs yeux.


1 insémination artificielle avec sperme de donneur
*prénoms fictifs